mercredi 19 novembre 2008

le diamant bleu de la couronne a été retrouvé


Tout commence par la découverte, il y a un an, dans les fonds anciens de la collection de minéralogie du Muséum National d’Histoire naturelle, d’une copie en plomb d’un très grand diamant. C’est pour François Farges, chercheur au Département Histoire de la Terre, et son équipe internationale, le point de départ d’une incroyable enquête historico-policière qui va les mener sur les traces du mythique « diamant bleu de la Couronne ». En effet, il s’avère que cette réplique – réalisée avant sa transformation – et celle du plus célèbre des joyaux des rois de France, volé en 1792.
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Ramené des Indes, en 1668, par le grand voyageur et commerçant Jean-Baptiste Tavernier, cet énorme diamant brut pesant 115,28 carats est présenté à Louis XIV qui décide aussitôt d’en faire l’acquisition. La facture de Tavernier indique : « 220.000 livres pour un grand diamant bleu, en forme de cœur, court, taillé à la mode des Indes, pezant 112 ks 3/16 ». En 1671, le roi en confie la taille à Jean Pitau, son joailler, qui va en faire un chef d’œuvre de l’art lapidaire du baroque français. Le résultat est impressionnant : d’un bleu foncé exceptionnel, la nouvelle pierre se présente désormais sous la forme d’une rose centrale – la fameuse rose de Paris – en sept facettes, d’une symétrie parfaite et d’un éclat incomparable. Elle ne pèse plus que 69 carats. Après le « Sancy », le diamant devient ainsi le deuxième plus important joyau de la Couronne de France. Louis XIV le fait monter sur un bâtonnet d’or émaillé pour s’en servir comme épingle de cravate. Un peu plus tard, sous Louis XV, le diamant bleu est placé par Jacquemin, son joailler, au centre d’une fabuleuse toison d’or, la plus belle décoration jamais réalisée jusqu’alors. Les experts de l’époque le décrivent comme « Un très grand diamant brillant, bleu, de la plus riche couleur, forme triangle, parfait dans ses proportions, vif et net, annoncé peser 268 grains 2/16 ou 67 carats 216, estimé, vu sa rareté et grande beauté, trois millions ».
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En 1792, la Toison est volée lors du pillage de l’Hôtel du Garde-Meuble, à Paris. Le diamant bleu disparait alors pour toujours. L’histoire de cette pierre aurait pu s’arrêter là si l’obstination de François Farges n’avait permis d’en retrouver la trace. Tout d’abord, grâce à l’étiquette originale de la réplique en plomb – qui avait été intervertie avec une autre – il apprend qu’un certain Charles Achard, joailler à Paris, en a fait don au Muséum, précisant que la pierre dont il a fait cette copie appartient à son client « Mr Hoppe de Londres ». M. Hoppe n’est pas un inconnu. Henry Philip Hope, grand banquier londonien est en effet célèbre pour avoir possédé, dans les années 1810, un grand diamant bleu à qui il a donné son nom. Bien sûr, des esprits perspicaces se sont interrogés, dès 1856, sur les véritables origines du diamant Hope. Mais jusqu’à aujourd’hui sans certitude. Grâce aux investigations de François Farges et de son équipe on a maintenant la preuve que ce banquier a acheté la pierre volée à Paris, après 1792, et l’a fait retailler – sous sa forme actuelle - pour éviter que la France ne la réclame. Un véritable sacrilège puisque le diamant Hope ne pèse plus que 45,5 carats. Après le décès de ce dernier, son petit neveu en hérita puis fit faillite. Au siècle dernier, le diamant bleu passa entre les mains de différents négociants ou joailliers (Adolf Weil (Londres), Simon Frankel (New York), Salomon Habib, C.H. Rosenau, Pierre Cartier (Paris)) avant d’être donné à la Smithsonian Institution de Washington, où il est conservé depuis.
Ultime preuve : la comparaison numérique du diamant bleu tel qu’il a été reconstitué par le Muséum d’Histoire naturelle avec le diamant Hope démontre que les deux pierres concordent parfaitement « au centième de millimètre près ». De même que le poids du modèle en plomb est parfaitement identique à celui du diamant bleu de la couronne, avant son irréparable retaille. Ces recherches ont permis de faire réaliser, en zircone, une réplique exacte de la pierre de Louis XIV. Ce travail a été confié à Scott Sucher, lapidaire et spécialiste mondial des copies des grands diamants historiques. Ce diamant bleu factice pourra être admiré, à partir de 2010, dans la salle du Trésor de la Galerie de Minéralogie et de Géologie du Muséum national d’Histoire naturelle de Paris. En attendant, accompagné de son modèle en plomb, il va rejoindre le diamant Hope, à Washington, pour une exposition spécialement dédiée à cette découverte.
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Bibliographie
Farges F., Sucher S., Horovitz H. and Fourcault J-M, Deux découvertes majeures autour du « diamant bleu de la Couronne », Revue de Gemmologie (2008), volume 165, pp. 17-24

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